Dans une interview avec le programme MED-GEM Network, Basel Yaseen, directeur général de l'Autorité palestinienne de l'énergie et des ressources naturelles pour les énergies renouvelables (ER), l'efficacité énergétique (EE) et les changements climatiques, point focal national pour le réseau MED-GEM en Palestine et également point focal dans la plateforme ER et EE de l'UfM, aborde divers sujets liés au secteur de l'énergie en Palestine. L'interview explore les défis et les opportunités des énergies vertes, y compris la production d'hydrogène renouvelable, et examine les politiques mises en place pour promouvoir les énergies renouvelables dans la région. Yaseen discute également des obstacles rencontrés, tels que les contraintes politiques et la disponibilité limitée des terres, soulignant l'importance du soutien international pour reconstruire et restaurer les systèmes d'énergie renouvelable suite à des situations politiques complexes.

🎥 Regarder l'interview

Pouvez-vous présenter le secteur de l'énergie en Palestine ?

Le secteur de l'énergie en Palestine dépend de différentes ressources, car il ne dispose pas de génération locale. Ainsi, nous devons obtenir notre énergie électrique d'autres pays, tels qu'Israël, qui fournit plus de 87% de notre électricité, avec une plus petite portion provenant de pays voisins comme la Jordanie et l'Égypte. C'est pourquoi je pense que nous devons examiner notre sécurité énergétique et notre indépendance énergétique.

En regardant les sources d'énergie renouvelable, il est évident que c'est une source très prometteuse. Au cours des dix dernières années, nous avons cherché à couvrir certains besoins de base pour les habitants, en particulier dans les zones reculées. Cependant, cela devient une question de plus en plus prometteuse, avec des investissements croissants et des opportunités pour les habitants de se connecter et de bénéficier de la vente d'électricité aux distributeurs.

De nombreuses entreprises ont émergé sur le marché, créant des emplois et des opportunités, notamment des installateurs, des vendeurs de modules, d'onduleurs et d'autres composants des systèmes photovoltaïques (PV). Les ingénieurs ont également des opportunités dans ces entreprises en tant qu'ingénieurs techniques ou managers spécialisés dans l'énergie et les sources d'énergie renouvelable.

Quels sont les principaux défis et opportunités pour les énergies vertes et la production d'hydrogène renouvelable ?

Nous avons atteint un stade mature dans les énergies renouvelables, principalement dans la technologie solaire. Les défis surviennent lorsqu'on envisage d'autres sources en raison de nombreux obstacles. La technologie solaire, caractérisée par sa simplicité d'assemblage et de production d'énergie, se distingue. Cependant, d'autres sources telles que l'éolien ou le biogaz font face à d'importants obstacles techniques et politiques, notamment pour l'énergie éolienne.

Au cours de la dernière décennie, des efforts ont été déployés pour acquérir des éoliennes de petite capacité, allant de 750 kilowatts à un mégawatt. Malheureusement, le succès a été entravé par des obstacles israéliens liés à l'importation, au transport et aux préoccupations politiques en matière de sécurité. Des restrictions de hauteur, interdisant aux éoliennes de dépasser 50 mètres, compliquent davantage ces défis.

Un autre défi significatif concerne les terres nécessaires aux systèmes PV. En Palestine, en particulier en Cisjordanie, à Gaza et à Jérusalem-Est, les terres disponibles sont limitées et coûteuses. Selon la classification d'Oslo, une partie substantielle des terres (environ 62%), principalement en Zone C sous contrôle israélien, ne peut être utilisée. Malgré de nombreux espaces vides en Zone C, des restrictions empêchent leur utilisation. Une petite fraction de cette zone pourrait répondre suffisamment à tous les besoins en énergie renouvelable de la Palestine, mais malheureusement, son utilisation n'est pas autorisée.

Le troisième obstacle concerne la structure unique du secteur de l'énergie dans notre région. La présence de nombreuses sociétés de distribution, chacune avec sa propre zone de concession et sans interconnexions, affaiblit la capacité du réseau de distribution. Cette limitation entrave la gestion efficace de capacités énergétiques plus importantes issues de sources renouvelables. La modernisation du réseau, l'amélioration de sa capacité à absorber plus d'énergie et la mise en œuvre de solutions de stockage sont cruciales. De plus, sécuriser l'accès à la Zone C, actuellement contrôlée par Israël et utilisée pour leurs propres projets photovoltaïques et énergétiques renouvelables, est essentiel. Des développements récents indiquent des plans pour un projet significatif d'hydrogène à être installé dans la Zone C du côté israélien.

Quelles sont les différentes politiques actuellement mises en œuvre en Palestine?

Nous avons commencé en 2010 avec une petite initiative impliquant des systèmes panneaux photovoltaïques, des toits et le secteur résidentiel, qui s'est avérée très réussie. Le public a manifesté un vif intérêt pour investir et adopter la technologie des énergies renouvelables. Cependant, en raison d'une crise économique en 2014, l'initiative a été temporairement interrompue, pour reprendre en 2017, et elle se poursuit aujourd'hui. Cette initiative prometteuse permet à chaque habitant d'installer jusqu'à cinq kilowatts sur son toit, lui permettant d'utiliser et de vendre l'excès d'énergie aux compagnies de distribution grâce à un mécanisme de tarification d'injection.

Il existe également une initiative de comptage net dans le secteur industriel, entraînant la mise en œuvre de plus de 3000 systèmes PV selon ce mécanisme, qui fonctionne efficacement. De plus, l'option d'offres directes permet aux investisseurs de s'adresser au gouvernement ou à l'autorité de l'énergie propre pour investir dans des systèmes PV à plus grande échelle. Avec des lois et une infrastructure en place, les systèmes PV à grande échelle actuels peuvent potentiellement être réorientés vers la production d'hydrogène et les techniques de stockage, suivant l'approche d'autres pays utilisant les ressources d'hydrogène à des fins locales, non pour l'exportation à grande échelle. Nous cherchons en effet à utiliser l'hydrogène localement et à mettre en place des projets pilotes. Il est essentiel de déterminer les besoins en hydrogène et les infrastructures nécessaires pour progresser dans l'utilisation de cette ressource.

En ce qui concerne les stratégies et les objectifs, nous avons établi des plans pour 2030 et 2040. Notre participation active aux Contributions Déterminées au niveau National (CDN) reflète notre engagement envers les plans nationaux et internationaux en matière de changement climatique. Nous suivons nos étapes pour atteindre ces objectifs. Donc, nous avons besoin de soutien à cet égard. Malgré un soutien passé, en particulier dans la bande de Gaza, les situations politiques récentes ont conduit à la destruction de la plupart des systèmes dans cette région.